dimanche 22 septembre 2013

Robert Gaillard dit Schuman, plus jeune résistant de France ?

Encore une fois, l'un de mes articles porte sur les dossiers de Combattants Volontaires de la Résistance. Cette fois, l'originalité tient à l'âge de la personne concernée...

Mais pour présenter Robert Gaillard, il est nécessaire de s'arrêter sur l'un de nos plus grands hommes politiques : Robert Schuman.

Qui est Robert Schuman ?

Portrait de Robert Schuman (1951)
Robert Schuman, qui reste pour la postérité l'un des pères fondateurs de notre actuelle Union européenne, est né en 1886 à Luxembourg, et est allemand de naissance, français d'origine. Devenu avocat en 1912, il devient citoyen français après le retour de la Moselle à la France à l'issue de la Première Guerre mondiale.

En 1919, il est élu député de la Moselle et ce jusqu'en 1940. Cette année-là, la France est en guerre contre l'Allemagne nazie. En mars, Schuman est nommé sous-secrétaire d'Etat pour les Réfugiés. Dès l'établissement du Régime de Vichy, Schuman est confirmé à ce même poste, votant les pleins pouvoirs à Pétain le 10 juillet 1940.

Après l'annexion de la Moselle, Schuman est arrêté puis emprisonné à Metz puis Neustadt. Il parvient à s'évader puis franchit la zone dite "libre" dès l'été 1942. Il passera notamment par la Vienne, l'Ardèche, et donc l'Ain.

Schuman à Bévey

Parmi les endroits où séjourna Schuman, un petit village de l'Ain : Beaupont, à 30 km de Bourg-en-Bresse, dans le canton de Coligny et frontalier avec le département de la Saône-et-Loire. Schuman n'y est pas seulement passé quelques jours : il demeura près de huit mois dans l'orphelinat de Bévey, de novembre 1943 à la Libération.

Beaupont (Archives départementales de l'Ain, série Fi)

A l'origine de son passage à Beaupont, Schuman débarque à Bourg, se fait héberger pour une nuit chez les époux Brazier, avant d'être amené à Beaupont chez son ami l'abbé Guerber, ancien chanoine de Metz. Celui-ci lui ouvre alors l'orphelinat, plaque tournante de réfugiés notamment lorrains. Schuman y change son identité et devient Robert Durenne, transformant ainsi le nom de sa mère : Düren.

Robert Gaillard

Les troupes d'occupation et la Milice renforcent progressivement leur présence dans le secteur de Coligny (patrie de Darnand, pour l'anecdote). Schuman doit alors veiller à ne pas trop s'exposer. C'est là qu'intervient Robert Gaillard.

Robert Gaillard n'a que 4 ans mais sera d'une importance capitale pour Schuman : il sera chargé de l'accompagner jusqu'au saule creux qui se retrouve sur la route de Saint-Amour et vers le pont du Solnan, arbre dans lequel le courrier clandestin à destination de l'homme politique. En cas d'arrestation ou de contrôle, le courrier était alors disposé dans le tablier de l'enfant.

Route de Saint-Amour, à Beaupont (Archives départementales de l'Ain, série Fi)

Il aurait également sauvé plusieurs fois Schuman en le nommant "Pépé" afin de détourner l'attention de la Gestapo comme ce jour où un camion de soldats allemands demanda la route de l'hospice à Schuman.

Témoignage d'une résistante de Beaupont (Archives départementales de l'Ain, 1548 W, dossier Gaillard)

La fin de la guerre

Le 8 septembre 1944, Schuman est à Bourg et prend la tête, lors du défilé de la Libération, des Alsaciens-Lorrains expatriés.

L'après-guerre

A plusieurs reprises, Schuman remercia le jeune enfant. Des colis de linge de la Croix-Rouge lui était alors envoyés à de multiples reprises. Robert Gaillard demandera l'obtention de la carte de Combattant Volontaire de la Résistance en 1986, mais ne l'obtient pas. Jusqu'à son décès l'année dernière, il revendiqua son statut de "plus jeune résistant de France" et aura pour la postérité un surnom : Schuman.

Quant à Schuman, il redevient député de la Moselle jusqu'en 1962. En parallèle, il fait partie de divers gouvernements de la IVe République pendant presque dix ans, devenant notamment président du Conseil (1947-1948), ministre des Finances (1946-1947), ministre des Affaires étrangères (1948-1953) qui lui permettra de participer à la création de la CECA (Communauté européenne du Charbon et de l'Acier), et ministre de la Justice (1955-1956). Il devient ensuite le premier président du Parlement européen (1958-1960). Robert Schuman décédera à Scy-Chazelles, en Moselle, en 1963, à l'âge de 77 ans.

Sources

Archives départementales de l'Ain. Sous-série 1548 W, dossier Robert Gaillard.

BOCQUILLOD (Emile). Rassemblement : retour à Bévey en 1986.  Article de presse. 1986.

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